L’importance des écoles de la Fondation pour le développement de l’éducation – FDE (2), situées dans une triste périphérie que la planification urbaine prive de toute illusion, nous montre comment la profession d’architecte, dans un milieu restreint mais plutôt exigeant, permet l’exercice d’une résistance.
Les quatre établissements présentés dans cet article manifestent, grâce à des processus formels simples et efficaces, une présence urbaine d’une stabilité remarquable, au regard des petites dimensions des terrains adjacents destinés aux ensembles de logements. L’organisation du programme indique le souci de donner un sens à la succession et à la distribution des parties.
Ayant un programme identique, les quatre projets semblent soumis à la même série de conditions. L’une d’elles concerne la structure primaire, un système de construction isostatique réalisé avec des éléments préfabriqués en béton, combiné avec une structure secondaire constituée de profils métalliques. Une autre condition est liée à la compacité et à la fermeture des bâtiments, qui doivent procurer une protection adéquate face au climat chaud de Campinas. Le gymnase polysportif doit en outre pouvoir être utilisé de manière indépendante par rapport à l’entrée de l’école.
Selon la théorie moderne, les dimensions modulaires des structures de béton préfabriquées exigent une très grande précision des plans. Malgré le soin apporté par les architectes, les structures préfabriquées ont été surdimensionnées, à cause d’un contrôle insuffisant lors de la production. Cela explique pourquoi les bureaux d’architecture mandatés pour la décidé de privilégier la structure du plan
plutôt que son apparence. Doutant du résultat formel donné par le rythme du système de construction et la partition peu rigoureuse des axes des poteaux et poutres qui la forment, ils ont préféré recouvrir leurs bâtiments d’une peau en façade, se conformant à l’esthétique qui prévaut en ces temps de virtualité.
Le projet du bureau MMBB (3) fait exception, car la décision de présenter la structure comme génératrice de la forme finale semble découler de l’usage de panneaux de cobogó (4) préfabriqué. Ce choix a néanmoins été subverti par de grands bandeaux colorés qui rendent la compréhension de l’édifice difficile. Le chromatisme expressif, sur panneaux ou sur d’autres éléments, présent dans tous les projets, semble confirmer une tendance “paulista” (5), inaugurée par Artigas et Cascaldi.
Les trois autres projets, synchrones avec les modes contemporaines, disposent des panneaux sur la façade en béton – d’une manière abstraite plus “perceptive” que “sensitive” – pour matérialiser les enveloppes de grande dimension, dématérialisées ou texturées par les divisions fines du brise-soleil favorisant une illumination diffuse. Les encadrements collés et exposés, plus appropriés pour des structures en porte-à-faux, font peu de cas des détails de protection, d’étanchéité et de finition, au point d’en compromettre la durabilité et la résistance. Ces détails auraient pu être améliorés par un allongement de la surface métallique sur la structure préfabriquée, ceci afin d’éviter les jonctions de gouttières au moyen de vis pop, lesquelles ont pour effet d’intensifier l’aspect misérable et le désalignement que l’on déplore communément dans les ouvrages publics. Andrade et Morettin (6) ont un peu exagéré le manque de consistance de leur construction en recouvrant un volume unique avec deux types différents de protection légère en panneaux de plastique. Il en résulte plusieurs textures en façade, séparées par des profils rudimentaires faits de bandes métalliques galvanisées fines. On devrait toujours exiger des détails plus rigoureux dans ce genre de bâtiment, où la maintenance n’existe pas et le vandalisme est très présent.
Des terrains polysportifs couverts, associés au corps principal de la construction, constituent l’argument majeur de l’organisation des quatre écoles. Le bureau UNA (7) a placé le terrain de sport audessus du troisième étage de l’école et développe ainsi le projet le plus synthétique, précis et vertical. Il est volontairement monumentalisé par des fentes verticales aux extrémités, recourant à de fins poteaux renforcés par une prothèse métallique qui empêche le flambement. De manière opposée, les architectes Vainer et Paoliello (8) ont prolongé la dalle pour recouvrir le terrain de sport et trouver la solution la plus claire, compacte et certainement la plus économique. Leur bâtiment strict présente un rez-de-chaussée dont les formes et les proportions sont bonnes, mais qui aurait pu être amélioré de manière à briser l’insolation des salles de cours. De même, on aurait pu attendre une meilleure solution pour la façade nord, où l’école s’ouvre vers le trottoir et le parking au rez-de-chaussée, avec des percées mal définies. Le rapport du bâtiment avec le sol et un trottoir étroit correspondent aux mauvais exemples des blocs de logements voisins. Une solution plus convaincante se trouve juste à côté, dans l’école réalisée par le bureau UNA. Là, en longeant un mur qui entre sous une dalle, devenue marquise par l’élargissement du trottoir, on arrive à la porte couverte qui permet de découvrir, au fond, la transparence de la cour couverte liée au jardin. Cette solution illustre un retour vers cette simplicité et cette générosité qui font la bonne architecture.
Dans un plan impeccable, le bureau MMBB place le terrain couvert dans une cour formée par deux blocs parallèles, malgré le risque acoustique de cette solution. Ce problème est du reste valable pour tous les projets. La juste disposition du programme constitue une prémisse impérative, si l’on considère le manque d’attention prêté aux mesures d’isolation et de protection acoustique.
Les architectes Andrade et Morettin ont pris un risque en choisissant une organisation programmatique sujette à controverses. En disposant le terrain de sport au premier étage, de manière à ce qu’il recouvre le rez-de-chaussée, qui se trouve simultanément en relation avec la cour couverte, ils créent un rapport ambigu avec le vide transversal, vertical et ordonnateur qui donne accès aux salles de cour. Ils semblent travailler avec deux principes d’organisation conjoints, ce qui génère un conflit dans cet espace dédié à la convivialité. La mise en relation du vide vertical et de la cour horizontale, encombrée de pilotis, affecte les deux espaces: le premier est envahi par la présence des lourdes structures métalliques des escaliers et des ascenseurs, alors que le second, du fait de sa profondeur, paraît confiné et sombre. Enfin, la décision de surélever le terrain de sport dans ce site a obligé la construction d’une rampe extérieure importante, pour répondre à la condition d’un usage indépendant de l’école, ce qui affaiblit l’expression formelle prismatique du bâtiment.
Les plans et coupes de tous ces projets stimulent par l’absence d’arbitrage et par l’évidence de dessins opportuns et exigeants qui survivent, malgré les restrictions de moyens et de ressources et les conditions d’exiguïté des sites. Les fautes répétées doivent être comprises comme autant de subterfuges utilisés par les architectes parce qu’ils ne peuvent se fier aux processus de production qui conditionnent la forme des bâtiments. Si les architectes ne sont pas mandatés pour coordonner les décisions concernant les problèmes de la physique appliquée au bâtiment, leurs compétences pour synthétiser et ajuster les problèmes de formes sont mis en échec. Par exemple, la structure en béton préfabriqué est rudimentaire et primitive, réduite à l’essentiel dans sa conception et d’une exécution médiocre. On peut comprendre que le système n’a d’intérêt que s’il est possible de disposer de pièces parfaitement usinées, qui incorporent plus de détails et peuvent condenser et résoudre les problèmes. Par exemple, la relation entre le système de préfabrication et les réseaux hydrauliques ou électriques pourrait être optimisée si la structure était prévue et ajustée en conséquence. La coordination insuffisante des spécialités et l’improvisation qui en découle sont évidentes quand on tolère que tubes et conduites surgissent du sol à côté des poteaux pour alimenter les boîtes de répartition, les robinets ou les prises. Elles sont tout aussi évidentes quand on voit des pièces métalliques vissées sur les consoles en béton, où la forme de base ne découle que de la facilité de réalisation.
L’expérience de la FDE reste néanmoins positive car les équipes d’architectes ont démontré qu’il était possible de réaliser des projets en dépit des interventions politiques et de construire en canalisant leurs efforts pour le meilleur résultat possible. La FDE doit maintenant tendre vers l’amélioration de ces prototypes pour que les défauts constatés soient éliminés ou ajustés. Il lui faut tirer les enseignements utiles des processus de production, afin que les résultats n’aient plus à être considérés comme des expérimentations.
notes
à propos de l'auteur
Luis Espallargas Gimenez, architecte et professeur FAU PUC-Campinas et de la FAU Unip